
La fin du masque
J’ai porté un masque sur mon visage pendant des années. Avez-vous déjà vu ces emplacements publicitaires où des centaines d’affiches sont collées au fil du temps pour former un bloc, comme un mille-feuille ? Au bout d’un moment, les premières couches de colle cèdent sous le poids des strates de tous ces papiers et finissent par choir sur le sol. Voilà comment je représente la fin de ce cycle.
Jouer un rôle
J’ai joué un rôle de composition pendant de nombreuses années. Il fallait jouer le jeu en discutant des joueurs de football à la pause café, assumer les moqueries sur ce collègue différent, les blabla politiques, etc. Mon visage devait refléter des pensées stagnantes, dénuées de saveur. J’ai souvent voulu ne pas être trop différent et appartenir à un groupe. J’avais besoin que l’on reconnaisse ma valeur.
Enfant, je pensais que j’étais assez digne de confiance et courageux pour que l’univers m’envoie spontanément un mentor ou un maître d’arts martiaux pour me former, tel le nouveau petit dragon. La vie ne fonctionne pas ainsi. Le mérite dépend du regard des autres, et vous pouvez attendre toute votre vie que l’on vous place sur un piédestal parce que vous le méritez. Votre valeur est bien présente, simplement cachée derrière un ego qui attend toujours d’être choisi en premier lors des jeux dans la cour de récréation.
Quand le masque tombe
Quand le masque tombe, il n’y a plus moyen de le remettre. Une partie de votre esprit s’ouvre et ne pourra plus jamais se refermer. Alors, il peut être douloureux de participer aux jeux de vos collègues, amis et famille. Vous reconnaîtrez immédiatement le manque de courage dans leurs discours et les paroles feintes de vos semblables. Vos mots ne seront plus guidés, ils seront vrais et surgiront comme une évidence.
Une nouvelle perspective
Maintenant, vous ne serez plus vu comme une personne que l’on peut facilement rattacher à une cause. La théière a sifflé longuement avant de déborder pour répandre son liquide dans un nouveau sillon. Vous quittez pas à pas le troupeau et la voie qui vous était destinée. Ceci est une bénédiction, une version plus épurée de votre être.
Allégé, vous ne chercherez plus à faire allégeance à ce patron déboussolé, ni même à votre voisin parfait. Il vous reste à traverser ce désert, à vous asseoir au sol et à contempler la beauté du voyage qui vous attend.
Roland Martinez